Le beurre et la crémière

Alors que beaucoup de gens qui s'imaginent de gauche se demandent :

"mais nomdediou y'a quand même pas autant de gens de droite dans ce pays ?"

Alors que certains tentent d'y répondre en effet par de l'analyse fine du point de vue "idéologique", c'est à dire le glissement du language dans une société décrite comme de plus en plus violente par exemple. Le rôle de la peur et le besoin de sécurité (qui a bien été une des clés de cette mascarade encore une fois malgré ce que disent certains journalistes).






Mais vous trouverez sur le site suivant un article qui résume de façon assez large le besoin de voter à droite des français. Le texte est de Philippe Meirieu, dont vous trouverez une biographie ici. On notera les perversions du bonhomme :
Très impliqué dans les débats publics sur l'éducation en France, Philippe Meirieu a été très souvent pris à parti par les « républicains » ou les « disciplinaristes » qui l'accusent d'avoir contribué à la baisse du niveau des élèves ainsi qu'à l'effondrement de l'autorité des enseignants par son idéologie « pédagogiste », égalitariste et démagogique. Il s'est battu, pourtant, depuis toujours, pour une pédagogie exigeante, basée sur une transmission culturelle de haut niveau et qui ne sacrifie jamais ni les savoirs ni les élèves.
Un homme qui est décrit comme égalitariste ne peut pas être franchement bon n'est-ce pas ?
En même temps un homme dont Finkelkraut dit du mal ne peut pas être franchement mauvais...
Vous imaginez bien que le travail autour de la pédagogie d'un tel homme devait l'engager à ouvrir son clapet lors des déclarations fiévreuses du petit désormais président sur l'héritage de 68 et le besoin de liquider les dérives qui en ont découlé, en particulier au sujet de l'éducation.
En fait vous trouverez sûrement le personnage intéressant quand vous apprendrez sur le même site que l'irréprochable Gilles De Robien propose de l'embastiller pour avoir ouvert sa gueule à propos de ce discours de Sarko :
PARIS, 2 mai 2007 (AFP) - Le ministre UDF de l'Education Gilles de Robien a apporté son soutien à Nicolas Sarkozy qui avait fustigé dimanche l'héritage de Mai 68 en déclarant mercredi sur RMC Info que «le pédagogisme» hérité de cette période « ne permet pas aux enfants d'apprendre ».
« Le pédagogisme, cette façon de faire, ne permet pas aux enfants d'apprendre. Le pédagogisme emploie ces vocabulaires incompréhensibles pour les enfants, les maîtres et les parents, le pédagogisme on le traîne depuis 68 », a déclaré le ministre de l'Education.
Il s'en est pris au pédagogue Philippe Meirieu qui a estimé lundi que les propos de Nicolas Sarkozy sur Mai 68 relevaient d'un retour à « l'autoritarisme » prôné par Pétain.
« Il (M. Meirieu) devrait avoir honte parler de Pétain », a déclaré Gilles de Robien. « C'est une honte surtout venant d'un ancien enseignant et ancien directeur d'IUFM, je me demande s'il n'y a pas diffamation et lieu de le faire condamner par des juges puisqu'on est dans un Etat de droit », a-t-il ajouté.
« Il faut liquider l'héritage de Mai 68 qui nous a fait perdre 20 ou 30 ans de repères entre les droits et les devoirs », a ajouté le ministre en reprenant les mots de Nicolas Sarkozy.
Voilà, le toutou à son papa aboie, montre les dents, fait un pti pipi et va renifler un fion, nouveauté, il répète mot pour mot la voix de son maître...
Je vous laisse lire la réponse de Philippe Meirieu faite à L'huma, c'est édifiant.

Mais j'ai dérivé, et pour en revenir au texte plus haut, à savoir la coupure gauche droite dans notre pays, le pédagogue a une analyse que je trouve très pertinente : les gens sentent que nous sommes à une période critique de l'histoire, tout va très vite, on peut parcourir 15 fois le monde en une vie, on peut discuter avec la terre entière (non ça c'est le slogan de cisco, en réalité la terre se compose en majorité de pauvres qui n'ont pas le ternet), le climat inquiète, les polutions sont catastrophiques, le pétrole arrive en bout de course et les islamo-fascistes sont partout (je me demande si mon chat n'est pas une cellule dormante d'AlQuaida, c'est vrai il dort sans arrêt).

Dans ce contexte, et comme le dit Meirieu, les français veulent tout et son contraire, et c'est précisément ce que leur a promis le répressif désormais président :
Et l’on peut comprendre que beaucoup de Français aient été séduits : il est bien difficile de choisir entre des intérêts contradictoires et l’on préfère toujours avoir le beurre et l’argent du beurre : préserver la planète et ne pas se priver de la moindre dépense d’énergie… faire régner l’ordre public sans remettre en cause la répartition des richesses… s’occuper plus des vieux, des pauvres et des exclus en donnant moins d’argent pour cela à travers ses impôts… renforcer les services publics et supprimer des fonctionnaires… envoyer les enfants à l’usine quand ils ne réussissent pas en classe, mais à condition que ce soit les enfants des autres… pouvoir tranquillement déclarer que « quand même les Arabes ne sont pas vraiment comme nous », tout en expliquant que l’épicier arabe du quartier, lui, est un type formidable !... Bien sûr, ce serait vraiment bien si l’on pouvait tout avoir, la même chose et son contraire. Alors, pourquoi ne pas voter pour celui qui, justement, dit avoir trouvé la solution, celui qui – enfin ! – a compris, tout à la fois, les aspirations du peuple, le sens de l’histoire, les principes de l’économie planétaire et la bonne méthode de gouvernement ?
Je crois que tout est là. En leur temps, les politiques de droite ont fait peur aux français avec la crise, ils ont expliqué qu'il allait falloir se serrer la ceinture, que c'était fini les conneries, certains se sont serré la ceinture, les gros ont amassé les dividendes, les pauvres ont payé, le tiers-monde s'est enfoncé sous les ajustements du FMI.
Aujourd'hui, la droite vous explique que le problème, ce n'est pas vous, brave travailleur, c'est l'autre, le branleur, le jeune, le vieux, le fonctionnaire, l'artiste, l'africain. Peu importe si vous ne réalisez pas qu'en fait vous faites toujours partie du problème, que pour certains le vieux c'est vous, que pour d'autres le jeune c'est vous, le branleur... etc. Chacun espère s'en tirer, chacun espère tirer le petit morceau de couverture à lui.

La gauche ne devrait pas vous promettre tout ça, elle devrait vous expliquer que la très grande majorité des français peuvent vivre très bien en répartissant mieux, en relocalisant les productions, en donnant du sens aux industries, en prenant en compte les couts énergétiques de toutes nos activités, transports de biens et marchandises, en arrêtant de faire crever de faim les pays du sud tout en se donnant bonne conscience avec de l'aide humanitaire. Mais cet horizon n'est pas rose, il n'est pas réjouissant, il est limite "autoritaire", il imposerait des changements radicaux que nous n'envisageons pas. En tout cas les médias et leurs patrons multimillionnaires ne l'envisagent pas.

Quand le mur sera là, le choc risque d'être violent.

3 comments:

vlg said...

Les textes du 3 et du 7 mai sur le blog de Mérieux (dont tu cites les meilleurs extraits) sont absolument brillants, merci de nous les avoir fait connaître.

Et oui la gauche devrait faire comme tu dis, ça parait si simple et évident !

En attendant, tu devrais peut-être piquer ton chat, préventivement...

cartapus said...

Ah lalala on a encore quelques personnes à convertir...
Allez hop, on y retourne...

coco_des_bois said...

J'ai découvert Meirieu via une liste de diffusion de consom'solidaire, petite asso qui milite près de chez moi, films, réunions etc... j'avoue que ça fait du bien de lire de belles choses.

Mon chat est sous surveillance étroite et assigné à résidence, au moins frétillement de moustache (et de pipe) ... hop au goulag !